AINSI
S'ESSOUFLE LA VIE
Entre le passé
et l’avenir,
Ma mémoire
S’est perdue.
Elle a plongé
Dans l’abîme de l’oubli.
Je
retrouve
Des morceaux de douleurs,
Des morceaux de bonheur.
Le rêve et l’avenir
S’évanouissent dans le silence.
Dure réalité !
Mon
cœur,
Comme dans un sable mouvant
Aspire à un retour impossible.
Mirage !
La vie s’est enfuie !
Ainsi
s’essouffle la vie …
Réjeanne Veilleux 05-04-2003
(Pour ma mère Alberta Veilleux décédée
de l ’Alzheimeir 24-01-2000)
SOUVENANCE
Mon
père était l’homme aux deux métiers ;
Fermier et cuisinier dans les chantiers ;
Le meilleur cuisinier du canton,
Disait-on !
Avant
que l’automne n’installe la neige
Et que la forêt ne s’endorme pour de bon,
Malgré sa réticence
Papa redevenait un « Survenant ».
Départ obligé !
Il quittait sa famille
Pour plusieurs mois dans les chantiers.
Durant
les longs hivers rigoureux d’antan.
Maman à la maison
Avec cinq enfants et une jeune tante venue l’aider,
Devenait l’intendante du foyer
Et responsable des animaux de l’étable.
« La femme est seule, seule, à s’ennuyer, »
dit Gilles Vigneault.
Souvenirs
des longues soirées,
Des devoirs sous la flamme de la lampe à l’huile,
Du chapelet à la radio
Et comme seule distraction
Les belles histoires des pays d’en haut.
Avant
que les outardes crient leur arrivée,
Papa revenait des chantiers.
C’était la fête !
Des étreintes ! Des becs ! Des pleurs de joie !
Même les quelques centaines d’érables
De notre petite « sucrerie »
Accueillaient son retour
En versant des larmes sucrées.
Et
surtout, surtout,
Pour nous les enfants …
Des odeurs de cadeau !
Toujours le même !
Des odeurs de cadeau
Que dégageait une immense poche,
- Sac de voyage improvisé -
Présage d’un festin ! …
Des douzaines de bonnes grosses galettes de chantiers
Que seul papa savait si bien confectionner.
Comme
les retours de papa sentaient bon ! …
Comme ils goûtaient bon ! …
Un
demi-siècle après son départ.
Chaque fois que je me retrouve dans un camp de bûcheron.
Je revois mon père, roi dans sa cuisine
Et je sens les arômes de ses bons plats.
Réjeanne
Veilleux (C’était dans les années 1940)
Pour mon père, Philippe Veilleux décédé le
28-11-1954 à 45 ans.)
LES
MOTS EN PARADE
Absente
à la foule qui m’entoure,
Invitée au banquet des mots,
Je déambule dans un monde virtuel
À travers la multiplicité des oeuvres littéraires
Qui m’interpellent.
Les livres s’affichent,
Jubilent devant mes regards avides.
Une
image aiguise ma curiosité.
Prisonniers de leurs couvertures,
Les mots jouent à cache-cache,
Anticipant la découverte.
Mots
qui encouragent,
Mots qui distraient,
Mots qui instruisent,
Mots voyageurs qui font rêver,
Mots à lire et à relire ;
Ils ont mille choses à me révéler,
Allant des récits de voyages à la spiritualité.
Passion
de lire.
Secrets à découvrir.
Émoi de la lecture.
Faire durer l’instant.
Chacun y trouve son compte
Dans cette abondance hallucinante.
C’est la foire de l’imagination.
Trop
courtes,
Les minutes avalées par le temps.
Les titres flamboyants me provoquent.
Je reste sur mon appétit,
M’invente une histoire,
Anticipe le dénouement.
Réflexion
…
Hésitation …
Tentation irrésistible,
J’opte enfin pour un livre de Mandalas.
Un livre !
Un cadeau !
Il me transforme
Et me porte au-delà des mots.
Réjeanne
Veilleux avril 2004. Au Salon du livre.
LE TEMPS
D'escalier en escalier,
Je remonte le temps;
Le temps d'une douleur
Qui se cicatrise doucement.
D'escalier
en escalier,
J'expérimente le temps ;
Le temps qui me manque,
Le temps qui me fuit.
D'escalier
en escalier,
Je m'approprie le temps ;
Le temps de ma fragilité
Du moment présent.
D'escalier
en escalier,
J'apprivoise le temps ;
Le temps d'un souvenir
Qui s'estompe lentement
Au fil du temps.
D'escalier
en escalier,
J'exorcice le temps,
Le temps d'une respiration,
Le temps d'un partage.
D'escalier
en escalier,
J'accueille le changement
Et je cueille au passage
La transformation,
Cadeau du temps.
D'escalier
en escalier,
Je m'affranchis du temps ;
Le temps d'une seconde
Volée au temps.
Réjeanne
Veilleux 09-01-2005
PAUPIÈRE DE MIROIR
Emmuré dans
son silence,
Le miroir
A la paupière
Inlassablement ouverte …
IL VOIT ! …
Implacable
témoin,
Juge muet
De l’acte le plus noble
À l’action la plus vile …
IL A VU ! …
Derrière
la glace
Froide et insensible,
Se cachent,
Entremêlés,
L’horreur de l’inceste,
Le baiser de l’amant,
Les yeux rougis de la maman,
La bouche rieuse de l’adolescente amoureuse
Et le regard amer du travailleur injustement licencié.
À
la fois,
Le miroir
Voit …
Ensorcelle …
Réfléchit …
ET SE TAIT …
Réjeanne Veilleux 07-04-2002
BLESSURE
Je
l’ai choisi
Mon arbre,
Au tronc fort
Et rugueux.
Je
me suis approchée
De mon arbre,
Aux branches
Déployées.
Je
me suis adossée
A mon arbre …
Il m’a offert son énergie.
Je
l’ai observé
Mon arbre …
Et sa splendeur
M’a éblouie.
MAIS
À travers ses ramifications,
M’est apparue
Une énorme cicatrice.
Je
l’ai reconnu
Mon arbre …
Et j’ai fait corps
Avec lui.
J’ai
touché
À mon arbre.
J’ai touché
Sa blessure,
La blessure de ma vie.
Réjeanne
Veilleux 10-2002
BRÈCHE
À L'AMOUR
L’amour embrasé
S’est blessé,
S’est blessé
De vouloir trop aimer.
Routine,
Ambiguïté,
Épine au cœur, à l’âme,
Au corps
L’ont assombri.
Pierre précieuse
Polie,
Repolie
A subi
L’outrage de la négligence,
De la trahison.
Fissure,
Brèche.
L’amour mutilé
Agonise.
Mais,
Au-delà du désespoir,
Vit toujours l’amour blessé,
Meurtri,
Stigmatisé.
Lueur d’espérance !
Dans la Lumière de l’Éternel,
Rejaillira l’étincelle
De l’amour embrasé.
Un jour,
L’amour s’est blessé,
S’est blessé
De vouloir trop aimer.
Réjeanne
Veilleux 2003
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